Une brève histoire de la philosophie
20 chapitres pour 20 rencontres avec les silhouettes et les œuvres, entre autres, de Platon, Aristote, Saint Augustin, Spinoza, Diderot, Hegel, Marx ou Nietzsche. Des fiches pratiques et des conseils de lecture, mais rien de scolaire dans le ton.
Présentation de l’éditeur
Où trouver la vérité ? Dans les sciences, les religions, les arts ? Dans la raison humaine ? Ou dans la parole divine ? Cette vérité est-elle unique ou multiple ? Existe-t-elle vraiment, ou bien n’est-elle qu’illusion ? Et si c’est une fable, à quel besoin répond-elle ? Les philosophes n’ont cessé de tourner autour de ces questions. C’est pourquoi elles servent de fil conducteur à ce voyage dans la pensée, de Platon à nos jours. Vingt épisodes retracent avec clarté et allégresse ces aventures de la vérité, où l’on rencontre notamment Épicure, Machiavel, Descartes, Spinoza, Voltaire, Rousseau, Kant, Marx, Nietzsche… Objectif : offrir aux débutants, du lycéen à l’honnête homme de notre temps, une approche vivante, ni pédante ni sectaire, de l’histoire de la philosophie.
Une brève histoire de la philosophie, Flammarion, 2008, 318 p. / 19,90 €
Grand Prix du Livre des Professeurs et Maîtres de conférences de Sciences Po 2009
(traductions en cours en grec, en espagnol, en arabe)
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Extrait de l’introduction
Ce livre s’adresse aux débutants, quel que soit leur âge. Son but est de faciliter l’accès à ces massifs, parfois impressionnants, que constituent les grandes œuvres philosophiques. Pour y parvenir, deux ou trois règles. Commencer par écarter tout vocabulaire inutilement compliqué, car il est possible d’expliquer des questions complexes avec des mots simples. Se dire que les philosophes ne sont pas des extra-terrestres, mais des hommes qui habitent la même planète que nous, vivent les mêmes émotions ou les mêmes cauchemars. Ne pas croire que les idées forment un monde à part, se souvenir qu’elles sont tissées à la vie d’êtres humains, enfants de leur temps et de leur contrée, qui eurent à se battre contre l’indifférence, la calomnie, la bêtise – au point d’y laisser, parfois, leur peau.
On commencera alors à considérer les philosophes autrement. Non, ce ne sont pas des théoriciens froids, des gens austères éloignés des réalités humaines. S’il y a évidemment plusieurs manières de les lire et d’entrer dans leur univers, je préfère celle qui tient compte de leurs rapports à leur temps, à leurs émotions, à leur écriture. Ne pas hésiter à insister sur ce qui surprend ou indigne, suscite l’enthousiasme ou la colère. Ne jamais tolérer l’ennui. Voilà quelques préceptes de départ.
Que font les philosophes ?
Reste à préciser ce qu’on peut appeler « philosophie ». Si l’on admet que les gens qui s’en occupent sont comme les autres, que font-ils donc de particulier ? Ils se préoccupent de savoir si ce qu’on pense est vrai ou ne l’est pas. Leur travail est de chercher ce qu’on appelle « vérité », et de savoir comment la définir. Voilà qui demande éclaircissements.
Car tout le monde a des idées, tout le monde pense. Tout être humain possède des croyances, des convictions. Chacun forge des raisonnements, réfléchit sur son propre sort, s’interroge sur la condition humaine. Faut-il en conclure que tout le monde est philosophe ? Que tous les êtres humains font de la philosophie comme Monsieur Jourdain de la prose, sans le savoir ?
Au milieu de cette activité générale de l’intelligence humaine, qu’est-ce qui distingue, de façon singulière, les philosophes ? Pensent-ils d’une manière spéciale ? Oui. Car, si tout le monde a des idées, les philosophes, eux, examinent leurs idées. Tout le monde pense, mais les philosophes, eux, reviennent sur ce qu’ils pensent – pour le mettre à l’épreuve, l’examiner, faire le tri. La particularité des philosophes, la voici donc : ils pensent à leurs pensées.
On peut appeler ce mouvement « réflexivité ». Le terme signifie simplement « retour sur soi-même », « examen de ce qu’on croit et de ce qu’on pense ». Il se pourrait bien que ce soit le cœur de la démarche philosophique. En quoi consiste cet examen ? Le définir va permettre d’y voir plus clair.
Socrate comparait son activité à celle de sa mère, qui était sage-femme. Il disait accoucher des esprits alors qu’elle accouchait des ventres de femmes. Généralement, on a retenu de cette analogie que Socrate fait sortir les idées de la tête de son interlocuteur comme on tire l’enfant, au terme d’une grossesse, du ventre de sa mère. Or il y a plus que cela dans cette affirmation. On oublie en effet souvent de préciser que les sages-femmes de cette époque mettaient à l’épreuve l’enfant qui venait de naître. Cette mise à l’épreuve consistait à tremper le nourrisson dans une eau bien froide – épreuve à laquelle les plus malingres ne résistaient pas. L’objectif était de ne conserver que les enfants les plus robustes. Ce ne sont plus nos façons de faire ni nos manières de voir.
Mais ce détail doit servir à comprendre que l’important, pour Socrate, n’est pas de simplement « faire sortir » les idées de la tête de l’autre, mais de « tester » ces idées une fois sorties. Il s’agit de voir si elles tiennent le coup, si elles sont cohérentes ou si elles ne sont que du vent, des illusions de savoir, de fausses idées qui ne résistent pas à la moindre objection.
Il y a une différence essentielle entre « avoir des idées » et « mettre ces idées à l’épreuve ». Le propre des philosophes, c’est de tester les idées, d’essayer de comprendre si elles possèdent cohérence et solidité ou si elles renferment quelque vice de forme, quelque erreur qui fait qu’elles ne sont pas viables.
Descartes compare le tri de nos idées avec celui d’un panier de pommes. Pour ne conserver que les bonnes, en écartant celles qui sont tavelées et commencent à pourrir, il faut vider tout le panier, mettre la totalité des fruits sur la table, les examiner un par un. Voilà ce que fait un philosophe, et que nous ne faisons jamais spontanément : vider sa tête, mettre toutes ses idées sur la table, les observer une à une pour savoir celles qui doivent être jetées et celles qui méritent d’être conservées.
Répétons-le : en philosophie, il ne s’agit pas de penser, mais d’examiner comment on pense, ni d’avoir des idées, mais de les passer au crible et de les examiner pour savoir si elles sont solides. Voilà qui introduit une distinction entre ceux qui pratiquent cet exercice de réflexivité et ceux qui demeurent dans une pensée immédiate, spontanée, irréfléchie. Cette frontière, comment la franchit-on ? Comment passe-t-on du spontané au réflexif, de la pensée immédiate à celle qui s’examine ? Autrement dit : comment entre-t-on dans la philosophie ?
Avis de L’express.fr
Passionner le néophyte, ravir l’érudit: c’est le pari de la Brève Histoire de la philosophie de Roger-Pol Droit.
Introduire à la philosophie, expliquer ce qu’est cette activité née en Grèce vers 600 ans avant notre ère, qui a survécu au développement des sciences, au désenchantement du monde et à tous les scepticismes n’est pas une mince affaire. Agrégé de philo, auteur d’ouvrages de vulgarisation, Roger-Pol Droit vient de réussir cette gageure avec sa très sérieuse mais allègre Brève Histoire de la philosophie, qui passionnera le débutant et ravira le philosophe aguerri.
La réussite tient dans la méthode: en partant de ce qui semble le plus difficile, Roger-Pol Droit va droit à l’essentiel. Pourquoi Aristote est-il si terre à terre et Montaigne si filandreux? Pourquoi Hegel est-il si lourd et Voltaire si léger? Puisque c’est au style des philosophes que le lecteur le plus souvent achoppe, l’auteur en fait une clef de lecture des oeuvres, le lieu où une idée rencontre une sensibilité, un corps, une histoire: le philosophe aussi a ses humeurs.
En parcourant ce livre d’une honnêteté exemplaire – où Augustin le Père de l’Eglise est aussi bien servi que Diderot le matérialiste – on s’amuse à relever les infimes préférences et les discrètes audaces: introduire Descartes par le thème des passions et non par celui de la science; voir dans les Lumières non l’avènement d’une raison sûre d’elle-même mais son premier ébranlement; défendre farouchement la présence de Voltaire et de Montaigne au banquet, malgré leur dilettantisme apparent; y convier le discret Tocqueville, fin observateur du Nouveau Monde, et l’asseoir entre Hegel et Marx. A distance des clans et des écoles, cette histoire lumineuse vérifie une vérité qui l’est tout autant: pour comprendre les grands philosophes, il faut d’abord les aimer, sans parti pris, en oubliant les adjectifs trompeurs (épicurien, cartésien, etc.) qui dissimulent des aventures humaines souvent admirables de courage et de cohérence.
Philippe Chevallier
Avis du 20minutes.fr
Les voyages ont leurs guides pratiques, la philo a désormais son GPS. De Platon à Nietzsche, en passant par les philosophes des religions et des Lumières, Roger-Pol Droit propose une vraie chasse au trésor, simple, pratique et lumineuse, à travers l’histoire de la philosophie.
Karine Papillaud – ©2008 20 minutes
Traduction
Traductions en cours en grec, en espagnol, en arabe